lundi 30 juillet 2012

Un p'tit tour et puis s'en va

Avant toute chose,bonjour une anecdote oubliée dans le post précédent. Nous avons mangé à Sucre dans un restaurant végétarien expresse. Le restaurant n'est ouvert que de 12 à 14h, les assiettes des entrées sont déjà prêtes sur les tables (mais pas partout, il n'y a apparement pas assez d'assiettes!) et sitôt un plat terminé, on vous envlève l'assiette et on la remplace par la suite. Indépendament de l'avancement des compagnons de tablées. Tout est réglé comme une pendule à tel point que le repas est expédié en moins d'une demi heure. En plus c'était pas super bon et le jus fruit était franchement louche (on n'y a pas touché). Passons à autre chose.

Avec un jour de retard (pour cause de maladie de B.) et donc pour un jour de moins que prévu (pour cause de départ à La Paz) et sans le compañero (pour cause de pied à soigner), nous partons dans un trekk d'un jour et demi en direction du cratère de Maragua. Nous quittons l'auberge à 05h30, laissons nos sacs à l'agence Condor Trekker et embarquons avec nos 9 autres compagnons de marches, deux volontaires américains de l'agence (dont le très drôle J.) et deux guides locaux (dont l'un est une mine d'information que L. tentera en vain d'épuiser). Arrivés au point de départ de la marche, nous prenons un copieux petit-déjeuner devant une petite chapelle et le buste d'un indigène s'étant insurgé contre les espagnols en menant une insurrection de 7000 hommes. Le guide fait la première explication et me demande de traduire en anglais au groupe qui ne parle pas espagnol (nous sommes les seuls à le comprendre et les filles le parlent mieux que moi, mais je parle mieux anglais et j'avais eu le malheur de dire au guide qu'il pouvait me parler en espagnol au contraire des autres). C'est marrant à faire, mais ej n'ai toujours pas compris pourquoi moi, sachant que le volontaire J. parle très bien espagnol...
Nous entamons la marche sur un chemin de montagne pré-hispanique restauré mais dont le tracé existait déjà avant l'arrivée des Incas dans la région (au XIIème ou XIIIème siècle). Nous descendons jusqu'au fond de la vallée à flanc de montagne. Évidement, c'est fou. Nous atteignons une rivière, la longeons un peu, traversons un pont suspendu en cordes et planches (et c'est rigolo) avant de descendre pour le déjeuner sur une petite "plage" bordant une cascade où se baignent les plus courageux. Le déjeuner (que nous portions) est conséquent et franchement bon, le fromage vallant à lui seul le déplacement!
après s'être un peu reposé, nous reprenons la marche par une belle ascencion qui nous fait prendre 250m d'altitude en quelques dizaines de minutes. C'est la partie la plus difficile de l'expédition. Nous arrivons au sommet de la crête et pouvons contempler le chemin parcouru depuis le petit matin, c'est impressionant (surtout le paysage). Nous croisons des enfants des villages du coin qu'un anglais photographie tout en marchant ("oh! des pauvres! Souriez pour moi s'il vous plaît!". Grr. Il ne pensait sûrement pas à mal, mais le geste m'a énervé. Je nous trouve déjà suffisament envahissant à nous balader en étalant nos richesses sous forne d'équipement et d'appareils électroniques pour ne pas encore en rajouter...). Ceci dit, il a une vie plutôt cool: il est prof de sport, et avec sa copine (qui, avec ses lunettes, est le sosie d'une certaine berlinoise chez qui j'ai pu trouver refuge cette année - déconcertant), ils travaillent six mois de temps en temps pour se payer les voyages le reste du temps. Nous croisons également du bétail en arrivant dans le cratère (qui n'est en fait absoluement pas lié à un impact quelconque, mais un lac créé par la formation des cordillières qui s'est ensuite asséché), voyons une impressionante cascade de haut (qui s'appelle La Gorga del Diablo, la traduction est évidente) puis rejoigons le refuge pour la nuit, particulièrement cosy.

La mauvaise nouvelle, c'est qu'au cours du repas collectif et convivial, j'appred que les étrangers ont peur de venir en France parce que les français ont la réputation de ne pas les aimer. Ça m'attriste pas mal, et je suis encore plus déconcerté lorsqu'au moment de raconter des blagues, les seules qui nous viennent à l'esprit sont des blagues rascistes. Heureusement, j'en connais quand même d'autres...

Le lendemain matin, le départ pour les trois heures de marches se fait après un petit déjeuner à base de flocons d'avoines (dont je ne raffole pas). Nous entamons la sortie du cratère que je n'ai pas encore décrit, mais je ne trouve pas les mots là tout de suite, faudra me demander plus tard. Le paysage est toujours magnifique et multicolore (rouge, vert, bleu, jaune - encore une fois pour cause de minéraux). Il y a beacoup de poussières sur le chemin, blanche ou rouge. Nous déjeunons le long d'un aqueduc, sur un chemin de terre rouge, et je m'occupe personnelement de finir le stock de fromage. Le trekk se termine alors, après quelques minutes de marche et un trajet en bus qui, entre autre, traverse une rivière au pied d'un pont en construction.

De retour à l'agence, j'attend les filles partis faire un tour et S. qui doit nous y rejoindre. Je découvre, amusé que les chiens se font parfois adopter, celui adopté par l'agence se nommant Blackie, référence évidente à sa couleur. Après un passage chez C. pour le goûter et récupérer nos sandwichs, nous nous entassons à 8 dans un taxi sous l'oeil hilare d'un policier pour rejoindre le terminal et embarquer dans notre bus en direction de La Paz...

jeudi 26 juillet 2012

Et un peu de Sucre en poudre...

Une petite chanson pour vous accompagner dans la lecture de cet article au titre plus que douteux.

S. et moi arrivons donc après notre périple en autobus (et la découvert de la version bolivienne du semi-cama qui n'est autre que l'ancienne version chilienne: les bus gagnant une seconde vie en passant la frontière visiblement) à Sucre dans des conditions pour le moins improbables: à 3h du matin sans endroit où aller et sans hôtel ouvert à proximité du terminal. On prend l'option "réveiller les filles et voir ce qu'il se passera" ce qui nous emmène à travers la ville jusqu'à leur hôtel, fermé et complet. Nous passons tout de même quelques minutes à converser et nous raconter nos vies à travers une petite ouverture grillagée dans la porte en bois1. Finalement, S. et moi allons passer quelques heures dans l'hôtel d'à côté avant de rejoindre celui des filles après notre courte nuit, pour un petit déjeuner au soleil précédant une balade en ville.

Sucre est une petite ville du centre de la Bolivie dont le centre ville, de style colonial est tout mimi avec ces bâtisses blanches, ces rues plutôt calmes et sa météo clémente (il fait bon, malgré les quelques 2000m d'altitude).Je em dis que c'est peut-être la première ville d'Amérique Latine que je rencontre où je pourrais envisager de venir passer quelque temps tant elle diffère de l'empilement de maisons moches caractérisant toutes les autres villes rencontrées. Néanmoins cet avis changera lorsqu'à la faveurs d'une balade dans la nature alentours, je traverserai la ville "réelle" en dehors du centre-ville: un ensemble de maisons en brique claires, souvent inachevées, parfois encore en construction, dans la poussière et entouré du bétail (chèvres et porcs) de la famille. Entendons-nous bien: je ne dis pas que cette ville ne mérite pas d'y vivre à cause de sa réalité, je dis que l'image de carte postale qu'elle envoie en premier abord ne traduit pas sa réalité.

Après avoir attendu désespérement l'ouverture d'une église (la plus belle de Bolivie d'après le Lonely PLanet) fermée pour cause de travaux, nous nous dirigeons tranquillement (rapport à l'orteil violet du compadre) vers le mirador, point de vue sur la ville depuis le sommet d'une petite colline, en oubliant pas d'acheter des pâtisseries sur la route pour nous gaver accompagner limonade et jus de fruits pris là-haut.
Nous finissons la journée dans le petit restaurant français tenu par C., bon gaulois bourru, où nous dégustons quiche lorraine et crêpes. Ce restaurant sera notre repairs pendant les jours suivant, après avoir été celui d'à peu près tous les francophones de passages à Sucre désireux de profiter d'un peu de bouffe franchouillarde (du pâté, mes amis, du pâté! Et du bon!).

L'excursion aux Siete Cascadas du lendemain se fait en efectif réduit, puisque B. tombe malade dans la nuit et vient rejoindre le boiteux dans le cas des immobiles de la journée. C'est donc à deux que nous partons, accompagnés de D. notre guide bolivien, étudiant en tourisme et anglais organisant de petites excursions hors agence pour payer ses études. Nous commencons par sortir de la ville pour nous balader dans la nature en direction d'un ruisseau dévalant la colline et dont les formations rocheuses permettent de créer septs petites cascades et quelques retenues d'eau de cette eau limpide. Après un peu d'escalade pour un meilleur point de vue, nous nous installons quelques temps pour profiter du paysage et poursuivre notre discussion avec notre guide qui, bien que sympa, s'avère ultra-nationaliste: les péruviens sont tous des voleurs et les seuls voleurs de Bolivie sont péruviens, toutes les danses traditionnelles liées au dieu Tío2 sont originaires de Bolivie (c'est vrai, mais il nous l'a tellement rabâché que ça devenait épuisant) ou encore la guerre du Pacifique3> n'a pas eu lieu, les chiliens ayant profités d'un carnaval en Bolivie et au Pérou pour les envahir (c'est éminemment faux).
Nous aurons tout de même pu apprendre qu'Evo Morales fait beaucoup pour la campagne bolivienne, par exemple en facilitant l'accès à de meilleurs outils pour augmenter la production et l'indépendance des paysans; que le racisme anti-indigène (tendance chez les descendants blancs des colons) est passible de prison et que pour travailler dans le service publique il faut parler au moins une langue indigène en plus de l'espagnol4.
Sur le chemin du retour, après une petite grimpette, nous croisons vaches et chèvres, petit garçon ayant perdu ses vaches, dame ayant également perdu ses vaches (dans les deux cas, nous indiquons où elle sont puisque nous les avons croisées), L. apprend quelques mots de Quechua avec une dame qui nous vend du Coca de coca (vachement bon), nous apercevons des poupées de chiffons grandeur nature pendues aux poteaux électrique et apprenons que c'est un message à destination des voleurs ("voilà ce qu'on fait aux voleurs ici!" Hmm, hmm.), des cochons mangeant dans les détritus5, de la viande en plein air (comme sur tous les marchés boliviens) et des DVD pirates du dernier Spider-Man, sorti quelques jours plus tôt.

Puisque B. était malade, nous avons décalé le trekk prévu pour le jeudi au vendredi et profitons donc de notre jour bonus pour faire du shopping (un poncho, une veste en laine - je sais, ça change! - et une ceinture jolie pour ma part) et aller voir un film brésilien dont personne n'a retenu le nom6 dans l'auditorium d'un musée où nous avons pu regarder quelques masques traditionnels, impressionants.

Avant de terminer ce post sur Sucre, deux anecdotes: il y a un espèce de lynchen qui pousse sur les fils électriques et à côté d'un bâtiment administratif, on peut trouver une demi-douzaine de scribes équipés de machines à écrire, rappel pour nous touristes occidentaux que le taux d'alphabétisation du pays n'a pas encore atteint les 100%...


1: Dans une autre vie, un peu moins citadins, un peu plus sédentaires, nous aurions certainnement été de très bons voisins, occupés à palabrer à longueur de journée par dessus nos haies respectives, échanger les derniers ragôts du voisinage et se plaindre du beau temps qu'on attend toujours pour les betteraves du potager...
2: Le dieu sous-terrain, créé pour le smineurs qui mourraient sous-terre sans pouvoir être remontés et honorés comme il se doit.
3: Guerre entre le Chili, le Pérou et la Bolivie au milieu du XVIIIème siècle qui a vu l'annexation de l'extrême nord (péruvien) et de l'Atacama (bolivien) par le Chili, privant la Bolivie de son accès à la mer.
4: À ce propos, un fait qui mérite d'être noté: les policiers boliviens, en plus du drapeau national arborent le drapeau indigène en écusson sur leur uniforme. Je trouve ça vachement bien.
5: Malgré les fréquents panneaux Cuidemos el medio ambiente (nous faisons attention à l'environnement), la Bolivie comporte de nombreuses décharges à ciel ouverts au bord des routes, même si l'absence quasi-totale de poubelles est compensée par des travailleurs de nuit chargés de nettoyer les rues.
6: Il s'agissait d'une comédie romantique dont les rebondissements étaient prévisibles, mais toutefois attendrissante car centrée sur des soixantenaires.

mardi 24 juillet 2012

¡Hasta la Bolivia!

Voilà maintenant plus d'une semaine que je suis en Bolivie, et je n'ai toujours rien écrit dessus! Que de retard! Tachons dès à présent de le combler quelque peu.

Nous sommes donc lundi matin, il est 6h du matin et S. et moi attendons dans le froid mordant de l'aube Calamienne notre bus pour Uyuni (oui, j'y suis déjà passé, mais bon). Devant nous, quelques chiens déchiquètent des sacs poubelles pour y chercher à manger ou peut-être le ticket de loto gagnant qu'un malheureux alcoolique aurais jeté dans un instant d'ébriété égarement. Après avoir vu les mineurs partir dans les transports communs en direction de la fameuse Chuqui1 et une petite heure de retard et d'attente debout, nous embarquons enfion dans notre bus, direction la frontière. À la frontière chilienne, après avoir de nouveau rendu le titre de séjour (S. y laisse sa carte d'identité chilienne périmée depuis trois jours), nous changeons de bus (les véhicules chiliens ne vont jamais en Bolivie, c'est trop compliqués pour eux), et notre nouveau véhicule disposent de 5 places en moins que le précédent qui était plein, ce qui génère une légère confusion qui sera réglée lorsque les deux personnes n'ayant pas trouvé de place pour s'asseoir (les autres se tassent ou utilisent le sol au fond du bus) embarquent dans un autre bus à la frontière bolivienne. D'ailleurs, la frontière bolivienne2, parlons-en! Pour atteindre le poste d'immigration depuis l'arrêt du bus il faut ni plus ni moins "enjamber"3 un train de marchandise arrêté mais dont la locomotive semble en marche4. Une troupe de motard tout équipé prend la direction du désert et me fait envie.

Nous arrivons finalement à Uyuni, ville désertique déjà mentionnée. À première vue tout semble délabré, vide et poussiéreux, mais le centre ville quoique tout aussi poussièreux est un peu plus animé. On voit que c'est une ville ouvrière (dans un pays de gauche) à l'immense statue d'ouvrier du rail sur l'une des avenues principales et à la fresque dédiée à la solidarité entre les peuples latino-américains. On croise, comme dans toute la Bolivie, des gens (de tous âges) en habits traditionnels, les femmes avec leurs deux longues tresses et leur chapeau portant de lourds chargement (ça peut être des enfants) dans des baluchons faits en nappes aux couleurs fluos5.
On passe à la fraîche clinique locale pour que S. s'entende donner le choix entre trois options de guerison de son ongle incarné (gros orteil, pas de bol): l'arrachage barbare, la découpe un peu moins barbare et les antibiotiques inefficaces. Il choisit l'option inefficace en attendant Sucre. Ensuite, on enchaîne sur un petit restau touristique local histoire de ne pas manger que des sandwichs pendant 24h. Je prend (minute Instagram, sans les photos) des lamelles de lama séchées dans le Salar. C'est bon mais c'est plutôt du sel au lama. Après ce délicieux repas, embarquement dans le bus semi-cama en direction de Sucre où nous attendent les filles.
Regarder Le Baiser Mortel du Dragon est certes marrant (Jet Li en espagnol!) mais pas autant que l'ensablement du bus dix minutes après la sortie d'Uyuni! On galère un peu, on pousse et on utilise les planches du chantier devant lequel on s'est ensablés (au fait, il fait nuit), mais on s'en sort et on peut finir sans d'autre accrocs que le froid et l'absence de sommeil.


1: Mais si, souvenez-vous, celle que je n'ai pas pu visiter! (Rancoeur du jour bonjour)
2: Pas la même que la dernière fois. Vous vous imaginez un bus traverser le désert? Non mais franchement...
3: Comprendre: passer par le marchepied en queue d'un wagon, ce qui m'a fortement fait penser aux Vagabonds du rails, le bouquin de Jack London sur son expérience de hobo au début du XXème siècle.
4: Ouai, alors là c'est peut-être pas clair. En gros, le moteur semblait allumé, mais je sais pas si on parle du moteur d'une locomotive, quoique je vois pas pourquoi on ne le fera pas.
5: Voilà, si jamais il existait parmi les lecteurs de ce blog des gens frustrés de ne pas avoir eu une description de la ville la derniêre fois, maintenant c'est fait.

jeudi 19 juillet 2012

Périple minier

Vendredi matin, un peu dépité par le programme qui s'annonce (ne pas pouvoir aller à Iquique et m'ennuyer pendant trois jours dans la ville de Calama, pour ceux qui n'ont pas lu le précédent post), je quitte San Pedro après une bonne nuit de sommeil et avoir fini Le Pavillon d'Or.
Sitôt arrivé à Calama, je tente ma chance dans une agence de bus et ô miracle, il reste des places pour Iquique le lendemian à 16h. Comme je dois être là pour le compadre, je prend le retour dans l'après-midi du lendemain, ce qui fait que je ne passerai qu'une quinzaine d'heures dans la ville portuaire, mais au moins, entre les trajets en bus de 7h et la visite d'Humberstone, ça me changera de Calama et ça m'occupera. Ceci fait, je file à l'office du tourisme où j'apprend à regret que la visite de la mine de Chuquicamata, l'une des plus grande mine à ciel ouvert du monde1 affiche d'ores et déjà complet. néanmoins, on me suggère bien aimablement de laisser mon gros sac à l'office et de filer au point de rendez-vous de la visite y espérer un désistement, annoncé ou non.
Une fois là bas, j'attend une petite heure que soit passé le rendez-vous de ceux ayant réservé, sous le regard des mineurs imprimés sur les murs2. On m'annonce (ô joie) que je vais pouvoir visiter, on me donne mon billet et j'embarque même dans le bus, avant qu'un groupe de 9 personnes ne se décide à arriver, avec 15min de retard et réclamer leurs sièges, faisant valoir leur réservation de trois semaines. On nous (moi ainsi que 4 autres personnes dans la même situation) fait donc descendre et je perd (ô tristesse3) l'occasion de visiter ce lieu qu'on dit impressionant.

Je retourne donc en centre ville me chercher un hôtel, celui que j'avais choisi sur le guide du mec qui porte la terre en sac à dos (l'imbécile, c'est tellement plus facile de la faire rouler!) étant fermée. Je trouve, sur indication, un petit hostal, cher et glauque, mais qui ferra l'affaire pour une nuit, et je me met en quête de la bibliothèque où on m'a promi internet gratuit. Je trouve la bibliothèque, mais tous les postes sont occupés, je peux donc admirer cette précieuse institution composée ici de deux pièces comportant chacune une dizaine de rayonnage où s'entassent des livres vieux et abimés, ayant rarement l'air intéressant...
De plus en plus dépité, je quitte l'endroit et traverse le centre ville en direction du cyber pas cher que j'avais repéré depuis le bus me ramenant en ville après ma tentative ratée de visite de la mine. Ce faisant, je réalise que le Routard a bel et bien raison: cette ville est glauque. Au premier abord, j'avais, à la faveur d'une allée un peu verdoyante et de quelques bustes en bronze au soleil, cru la ville à peu près décente ñalgré l'avis du guide, mais je change à présent drastiquement d'avis: les rues sont sales, les gens ont l'air fatigués et les petits casinos4 glauques remplis de machines à sous pullulent. Du coup je passe sans remords plusieurs heures dans le cyber. En sortant, il fait nuit, et je m'empresse de rentrer dans mon trou après avoir mangé un (bon, tout de même, quoique ça ne vaut pas ceux que j'ai pu manger en France) burger péruvien. Je redécouvre alors ma chambre que je n'avais qu'entre-aperçue, le temps d'y laisser mes affaires: le tout ne semble pas sale, mais délabré. Le mur côté lit est composé de grandes plaques de bois reclouées, la salle de bain ne comporte qu'un lavabo et un trou dans le sol servant à l'évacuation d'eau de la douche dont on aperçoit encore le tuyaux (mais inexistante autrement), les draps sont propres mais le dessus de lit est troué en de nombreux endroits par les cendres de cigarettes et les murs sont tellement fins que j'entend le mec d'à côté grogner et un autre se raser par à-coups (une petite série de rasoir électrique toutes les 5minutes) quelques chambres plus loin. J'imagine très bien un gaillard dégarni et bedonant, en marcel et pantalon de pyjama rayé, macho et grande gueule, sortir et vociférer aue c'est pas bientôt fini c'bordel, y'em a qui dorment ici, bordel. Mais ça correspond pas trop à ma description du coup je reste dans le lit et je m'endors sur le début du Voyage au bout de la Nuit.
Le lendemain, après avoir quitté ce lieu réjouissant (et avoir été réveillé par le doux murmure de mon voisin s'étouffant et crachant ses poumons) et en avoir trouvé un mieux pour dimanche soir (nous partons à Uyuni le lundi matin très tôt), je retourne sur internet puis file vers Iquique. Mis à part la demi-heure de retard au départ et l'heure d'arrêt dans un dépôt sans raison, le voyage se passe bien et j'avance dans le Voyage. Arrivé à Iquique, un colectivo me dépose à l'auberge que m'avait indiqué un membre de CouchSurfing ne pouvant pas m'accueillir. Ambiance très sympa, je bois malgré l'heure tardive un coup avec la jeune gérante du lieu, une amie locale et un madrilennien de passage: ambiance auberge de jeunesse tranquille dans la tièdeur du soir. Le lendemain, lever tôt pour filer à la ville abandonnée de Humberstone, ancienne ville minière chargée d'exploiter le salpêtre. Comme c'est la fète à Tirana, village un peu plus haut, le tarif du transport est prohibitif et A., vieux chilien désirant lui aussi visiter la mine, m'aide à négocier le prix du transport en bus.

Le village d'Humberstone, classé au patrimoine mondial de l'humanité, est impressionant (ouai! J'ai tout dit comme tout le mode!). Perdu en plein désert, sortit de nulle part et intégralement dévoué à l'extraction du salpêtre, ce lieu a connu son heure de gloire jusqu'à la fin des années 50, si je ne dis pas de bêtise, ce qui est loin d'être certain. Dans les premières maisons, que je trouve bien larges pour être celles des ouvriers (et de fait, ce sont celles des chefs), sont exposés des objets du lieux et de l'époque qu'A. me nomme et qu'évidemment j'oublie. PLus loin, nous visitons l'école, ou`sont maintenus des tableaux et des bancs. Les murs sont couverts de petits grafitis, un certains nombre rendant hommage à des parents ou amis nés et ayant vécu ici. Dans une salle de classe, une série de panneaux porte le récit de la vie dans la ville par un ancien y ayant grandi. Partout, on trouve des des ustenciles ou des machines rouillés, des maisons à l'abandon. Je monte sur une petite dune pour avoir un point de vue global sur la ville et songe alors aux mineurs français du Nord, de St-Étienne ou d'Aveyron5, et me dit que j'aimerai bien connaître un peu mieux leur histoire, visiter leurs lieux. Après tout, ça fait un peu parti de mon histoire familiale.
Je visite encore les ateliers de fabrication des locomotives, de réparation des engins, le théâtre et le marché avant de m'en retourner.
Sur le chemin du retour, je peux apprécier la vue épustouflante d'Iquique que l'on rejoint par une route à flanc de colline surplombant les dunes de sables qui limitent la ville par l'est, l'océan se chargeant de la limiter à l'ouest... Je récupère mon sac à l'auberge et file prendre mon bus de retour pour Calama. Le séjour fut bref mais vallait la peine (quoique fuire de Calama une journée n'est pas vraimment une peine). La route du retour longeant le littoral est particulièrement agréable.
De retour à Calama, j'attend S. sur internet, après avoir eu droit aux recommendations joyeuses de la gérante de l'hostal: "en sortant d'ici, tu peux aller à gauche, c'est le centre-ville, mais ne vas pas à droite, il y a de la délinquance et de la violence.". Une courte nuit de sommeil, et en route pour la Bolivie, où nous attendent déjà les filles.


1: Pour l'univers et le reste, je manque un peu d'information, donc par respect pour la logique élémentaire je ne m'avancerai pas.
2: Dans un `bâtiment voisin des bureaux d'un important syndicat!
3: J'ai envie de mettre des "ô" partout aujourd'hui, peut-être la sortie du désert...
4: Plusieurs fois j'ai vu l'enseigne "juegos electronicos màs recientes" ("les jeux électroniques les plus récents") au-dessus de machines auxquelles jouaient peut-être ces saletés d'étudiants soixante-huitards en faisant leur tentative de révolution...
5: Et aux autres, en Grande Bretagne, et partout ailleurs, d'hier et d'aujourd'hui qui furent et sont tout autant nécessaires que méprisés, et je me dit qu'il faudrait que je lise Germinal...

dimanche 15 juillet 2012

San Pedro de Atacama, seconde

À peine rentré du fabuleux tour précédement décrit, je m'attèle à organiser l'intervalle de temps qui me sépare des retrouvailles avec S. à Calama le dimanche (aujourd'hui, donc, dans le temps de l'écriture). San Pedro ne manque pas de trucs à voir, mais je voudrais aussi avoir le temps de filer sur Iquique voir la ville minière abandonnée de Humberstone et visiter la mine de Chiquicamata à proximité de Calama. J'opte donc pour la fameuse excursion des Geysers du Tatio ainsi que l'observation des étoiles accompagnée par un véritable astronome français (Le désert de l'Atacama, par son absence de nuage, en l'un des sites d'observation spatiale les plus rentables au monde en terme d'efficacité de l'observation). Mais ce sera pour le lendemain, je prend mon après-midi pour avancer le blog et me coucher tôt. Et pleurer sur mon destin: le voyage à Iquique comme je me l'imaginais semblant impossible pour cause de fête locale remplissant tous les bus; je risque donc de me retrouver bloqué trois jours dans Calama, ville minière mal famée, sans rien à faire (d'après le Routard).

Le jeudi, levé à 4h du matin pour filer observer les geysers au lever du soleil. Après une grosse heure de route (et de fin de nuit) dans le noir, nous atteignons le site quelques minutes avant les que les premiers rayons ne dépassent de la cime des montagnes, coloriant la nuiy d'encre d'un bleu toujours sombre, mais néanmoins suffisant pour faire démarrer la visite. Notre guide, sosie de Rafael Nadal, commence par nous emmener dans un geysers non projectif, c'est à dire une simple cavitée remplie d'eau en ébullition (à 85 degrés Celsius, puisque nous sommes à 4300m au dessus du niveau de la mer), pour y poser les briques de lait du petit-déjeuner à venir et des oeufs pour les amateurs d'oeufs durs. La visite du lieu commence ensuite. Il s'agit d'un champs d'environ 80 geysers, tous d'eau. Rares sont ceux s'élevant à un mètre ou plus, néanmoins les conditions de pression et de température matinales permettent la formatin d'importantes colonnes de vapeur dèau qui assurent le spectacle. Ceux qui ne le savaient pas déjà grâce à leurs cours de lycées apprennent comment se forment ces geysers et tous le monde apprend qu'un certains nombre de personnes sont mortes d'être tombées dans l'un de ces geysers: les minéraux présent dans l'eau empêchant la cicatrisation correcte de la peau brûlée. Nous apprenons également que l'étendue du champs géothermique (10km2) empêche une exploitation industrielle du site (tentée deux fois avant qu'il ne soit déclaré patrimoine naturel), la pression étant trop répartie et pas assez forte pour générer un quantité suffisante d'énergie. Je vérifie que mon manteau acheté pour la Suède me protège effectivement sans problème des -7 voire -10 degrés regnant, mais je ne peux pas en dire autant de la technique des "doubles sockets" pour les pieds1. Après le petit-déjeuner, nous nous dirigeons vers d'autres geysers, toujours d'eau et de vapeur, plus grands (les plus grands du coin), plus impressionant et à proximité desquels se situe une piscine thermale naturelle (à 28 degrés: la plus froide que j'ai rencontrée). Flemme, oubli de maillot et surpopulation touristique me condamnent à préférer l'errance dans les volutes de fumée à la baignade (contrainte insupportable, vous vous en doutez).
Nous entamone ensuite la descente, nous arrêtant d'abord au bord d'un petit lac qui ne vaut pas vraimment le coup que je sorte de ma torpeur et du camion, puis dans un petit village indigène reconstruit pour le tourisme. Une famille s'en occupe par an. Les maisons basses, en pierres rouges (volcaniques, of course) et au toit de chaume sont surmontées d'une petite croix censée chasser les mauvais esprits. Je préfère m'aventurer de l'autre côté du village (construit le long d'une rue centrale) pour aller voir les ruines des maisons originelle, plus intéressantes à mon goût et qui, puisque dépourvues de toits et de mobilier, permettent mieux de se rendre compte de l'exigüité des habitats.
Enfin, nous rentrons sur San Pedro, il est 11h30. Si les paysages vallait certes le déplacements, je trouve néamoins que c'est l'excursion la plus touristique que j'ai faite et cela m'a un peu déçu.

De retour au village après deux heures de sieste ratée à l'auberge, je réalise que j'ai encore toute l'après-midi devant moi avant de savoir si l'observation des étoiles est possible (la confirmation arrivant vers 18h30). M'étant résigné à mes trois jours d'inactivité à Calama (j'ai décidé de partir de San Pedro le lendemain, l'afflux touristique s'intensifiant et me fatiguant), je décide de profiter de ce temps libre pour aller visiter le Pukara de Quito.
Après qulques minutes de vélo sur piste ensablée (c'est du sport!), j'atteint ce fameux fort Atacamène, lieux d'une résistance acharnée des indigènes face à l'envahisseur bouffeur de chorizo. Le pukara ("fort" en atacamène) est construit sur une colline au pied de laquelle on trouve un oasis, aboutissement du río de la vallée que surplombe également le fort. Il servait tout à la fois à se défendre en cas de bataille qu'à se réfugier en temps difficiles. C'est une sorte de Minas Tirith, en plus petit, plus démoli et en rouge. La première attaque espagnole s'est faite avec seuleument 100 cavaliers. Un peu présomptueux les gars. Finalement, après plusieurs tentatives, et l'aide d'une population adverse, les espagnols ont réussis à s'emparer du fort et pour fêter ça, ils ont décapiter 3002 guerriers atacamènes et plantés leurs têtes sur les remparts, histoire de dissuader les "subversifs" (s.i.c.), ces imbéciles refusant de s'agenouiller devant le premier connard débarqué là par hasard.

Au sommet du fort, en plus d'une vue magnifique, je(mais je ne leur parle pas) deux magnifiques gringos méritant un paragraphe dédaigneux et bas de ma part, tant ils portent sur eux d'être de complets gringos alors même que leur style aurait pu être cool en tant que rockeurs à Austin ou dans le désert californien. Jugez plutôt: l'un arbore un jean délavé, un tee-shirt à manche longue en toile légère, blanc, un panch noir, des chaussures et un chapeau de cowboy sur ses cheveux mi-longs. Son accolyte préfère la version mache courte du même tee-shirt, des converses, un bandana vert et des lunettes rondes et colorées. Tout deux parlent dans un anglais à fort accent que je ne parviens pas à identifier, tout persuadé que je suis de leur américanité. Je les ais déjà croisé plus tôt, à la terrasse d'un café touristique où ils s'extasiaient du caractère locale de la boissons quils venaient de consommer. Ici, au sommet de son magnifiques point de vue qu'ils ont tout de même le bon goût d'apprécier, ils discutent principalement de l'envie que ça leur donne de s'y saôuler à la tombée de la nuit, de tester la weed locale ou de prendre des champignons, mais je doute qu'ils parlent de cèpes... Je me garde bien de leur montrer que je comprend et je m'amuse tout bas à les mépriser, bien content qu'il n'y ait personne pour discuter avec moi et éviter de créer le même sentiment chez un autre touriste un peu trop imbu de lui-même!

Fin de l'intermède "méchanceté gratuite". Je redescent et entame l'ascencion du mirador d'à côté, plus long, plus beau. Il y a en fait trois mirador sur ce chemin. Le premier est une petite plate-forme, à hauteur du fort de la colline d'à côté, et est accompagné du poème Servir3 de Gabriela Mistral. Le second est un puit construit en spirale au sommet de la colline, dans un espace délomoté par une enceinte de pierre percée de deux arches. Le dernier s'atteint par un chemin le long d'une crête et débouche sur un monument érigé par les atacamènes d'aujourd'hui: une quadruple croix où est écrit en 4 langues (espagnol, portuguais, atacamène (je suppose) et quechuan (blind guess)) la phrase "Dios mío, Dios mío, ¿porque me abandonaste?" ("Mon Dieu, Mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné?"). D'ici, on ne voit que du désert et on a une vue plongeante sur les dunes, serrées et raides, de la Valle de la Muerte.

De retour au village, je tente le tout pour le tout et me renseigne sur les possibilités de rejoindre Iquique dans la nuit en partant après l'observation des étoiles. Il faudrait en fait ne pas faire l'observation, partir avec le dernier bus pour Calama et négocier avec le chauffeur du trajet vers Iquique (bus a priori complet). Du coup j'essaye d'avoir mon sac de prêt, avant dàller me renseigner sur l'observation des étoiles. C'est confirmé, je ne vais donc pas à Iquique. Je paye, attend le bus qui ne vient pas, et pour cause c'est en fait annulé. Remboursement et retour à l'auberge: il est trop tard pour le dernier bus. Échec. Dépité, j'hésite entre tenter de faire du stop le lendemain, ou tenter de prendre un bus pour l'Argentine, histoire de faire quelque chose de mes journées. Finalement, c'était galère, pas raisonnable, du coup j'ai préféré l'option grasse mat' et départ pour Calama...
Mais ceci est une autre histoire.

1: Faut bien faire des lessives de temps en temps...
2: Non, pas eux.
3: J'ai pas beaucoup cherché, mais j'ai pas trouvé la version traduite. Désolé pour les non-hispanophones.

samedi 14 juillet 2012

There and Back Again, 900km de 4x4 dans tes dents.

Dimanche dernier, L., B. et moi sommes partis en compagnie de 15 autres compagnons de route (et non pas 13 nains) en direction de la ville bolivienne d'Uyuni. Cette expédition (en 4x4, vous l'aurez compris) aura duré trois jours pour la majorité et quatre pour le seul valeureux à en revenir1 et nous aura fait traverser des paysages magnifiques, du désert aux volcans en passant par d'impressionantes lagunes et le plus grand salar du monde. En voici le récit.

Jour 1: le départ de San Pedro se fait à 8h du matin, dans l'obscurité relative d'un des rares jours sans soleil de la ville. La Cordillière au loin est surplombée de nuages sombres, mais il ne neige pas (encore). Nous passons la frontière chilienne et je perd mon titre de séjour provisoire (comme presque tout le monde, en fait). Nous contournons le volcan Licancabur culminant à 5900m, son voisin décapité de 5700m (imaginez avant l'explosion, du coup...)2 pour atteindre la frontière bolivienne. Enfin, frontière, c'est un bien grand mot. Disons plutôt la cabane en pierre qui sert de poste frontalier délivrant les visas et la vague barrière aussi facile à coutourner qu'un chat écrasé. En plus pour l'atteindre on a dû quitter la route bien goudronnée menant en Argentine pour un chemin de terre. S'ils avaient voulu faire une blague sur les différences économiques des pays, ils n'auraient pas pu mieux faire. On prend un copieux petit-déjeuner dans une autre cabane proche (d'ailleurs tous les repas seront copieux, je vais donc arrêter de le préciser, il faudra vous en souvenir), nous formons les groupes de 6 (nous serons 7: A., charmante - au début - chilienne de 24 ans, mariée (MARIÉE A 24 ANS!!) et voyageans seule ne désirant pas se retrouver avec les 5 membres de la famille faisant l'expédition), et entamons notre périple en Bolivie, pays "donde todo es posible y nada es seguro" ("où tout est possible et rien n'est sûr"), selon le conducteur du mini-bus nous ayant accompagné jusque là.
Premier arrêt à quelques kilomètres, la laguna blanca, presque entièrement gelée. Ensuite, arrêt à la "fameuse" laguna verde où nous saisissent un vent très froid et la beauté des roches volcaniques avoisinantes.6 Autour, les montagnes (qui sont en fait des volcans morts et pas enterrés, comme toute la cordillière) sont magnifiques7, teintées de rouge (peroxyde de fer) et de jaune (soufre). À côté de la lagune, il y a un petit bassin thermal à 38 degrés (je trouve pas comment faire le symbol sur ce clavier8), mais nous (L., B. et moi) avons beaucoup trop froid la flemme de nous baigner (en plus, j'ai déjà testé les thermes, et oui, on se cherche les excuses qu'on peut).
La parada 9suivant a lieu dans l'un des premiers lieux vraiment impressionant, à 4800m (soit à une pelleté près, la hauteur du Mont-Blanc) et sans la moindre neige: les geysers de lave. Il s'agit d'un ensemble de cratères d'où surgissent des volutes de fumées pour les geysers de vapeur d'eau ou des petites marres de laves en ebullition (à environ 100 degrés celsius), de couleurs différentes selon leur composition (grisâtre, marron ou noir). Autour de cela gisent des pierres volcaniques noires, résultat de l'explosion du volcan à deux ou trois kilomètres de là. Ce lieux, comme beaucoup de ceux que nous verrons et de ceux que j'ai déjà pu voir, est parfaitement inhabitable et je redoute le jour où l'expansion humaine le détruira, transformant la Terre en Coruscante et signifiant certainement la fin proche d'une humanité détachée de la nature depuis trop longtemps. C'est beau ce que je raconte. On dirait un chaman hippi. Mais c'est au groupe punk Éric Panic que ça me fait penser, et à leur chanson Le Jour où ils viendront cracher sur nos tombes. Voilà, voilà.
On continue notre route, rouler dans le désert c'est vraiment awesome et on atteint notre refuge de la nuit où l'on prend le déjeuner (bon), on se rend compte qu'on va vraiment se les peler cette nuit et puis on rembarque pour aller voir la laguna colorada tout près. Elles tient son nom des longues bandes de couleur rouge qui la compose. Située une vingtaine de mètres en contrebas de la plaine de cendres noires qui l'entoure, la couleur rouge de la majeure partie de son contenue n'a rien à voir avec une eventuelle reconstitution quotidienne et à balles rélles d'Omaha Beach mais provient au contraire des algues et de l'ocre (le minéral éponyme de la couleur) qui en tapissent le fond. Pendant ma contemplation, je me retrouve face à une image des plus magnifiques. Elle aurait bien mérité une photo, tiens. À gauche, le lac, rouge, avec une bande d'eau transparente dans le fond. Des flamants roses y cherchent de la nourriture. En face moi, dans le prolongement de mon regard, une langue de boue noire fait la jonction et la bord gris-blanc de cendres coloré de-ci, de-là par le jaune de la végétation éparse et du soufre. À droite, la pente noire qui mène au plateau. â l'arrière plan se dessine la cordillière et ses volcans sans neiges sauf un sommet suffisament haut pour en être partiellement recouvert et s'enfoncer dans les nuages bas de la fin de journée.
De retour au refuge, nous combattons le froid autour d'un thé tandis que l'enfant de la famille qui semble vivre là joue tranquillement dehors pendant que le soleil se couche et que la température tombe. Le repas arrive et nous dînons tous ensemble, tachant de faire connaissance entre membres de la même expédition, et pleurant sur nos vies à cause du froid de la chambre. Face à ce dernier problème, L. et B. opterons pour la solution radicale suivante: dormir ensemble dans le lit une place en doublant absolument tout: duvets, draps et convertures. Elles ont apparement réussi à avoir chaud, moins à dormir... Un dernier détail pour achever cette journée: le rideau de l'une des fenêtres de la chambre n'est rien d'autre qu'un drap SNCF. À part ça, on est à 4300m au dessus de la mer, de l'autre côté du globe. Normal.

Jour 2: Après une nuit visiblement difficile pour la plupart d'entre nous, nous repartons pour la plus longue journée du périple. On quitte la lagune pour s'enfoncer dans le désert accompagnés par des nuages sombres et quelques éclaircies. Au milieu d'une plaine de sable, el Arbol de Pierda (arbre de pierre) constitue le premier arrêt. Si la formation volcanique qui donne son nom au lieu est effectivement rigolote, le reste du lieu, constitué du même phénomène, mais dont la plus grande particularité est de parfois donner l'impression d'avoir été découpé au laser, est moins intéressant. La traversée du désert reprend, avec son lot de dunes franchies, on fait une pause devant une lagune finement gelée, la voiture cale mais redémarre avant que ça ne devienne drôle et on atteint un grand lac peuplé d'un nombre important de flamants roses ayant, d'après un panneau10 l'interdiction de voler. En bon rebelles, ils s'en foutent, courant sur l'eau pour se donner de l'élan, et obéissant d'instinct aux lois de la physique en démarrant systématiquement face au vent.
Après un pique-nique sur ce même lieu, nous entamons un long trajet sur une piste plus que cahoteuse avant de nous arrêter dans un véritable paysage martien (rapport à la couleur des roches, rien à voir avec la présence de petits trucs verts tirant des rayons lasers et allergiques à la musique): comme si une mer de lave, agitée, c'était tout à coup figée, les vagues encore suspendues, prêtes à s'écrouler... Peut-être l'un de mes lieux préférés jusqu'à présent. Nous poursuivons notre route, sur une piste en meilleur état d'où s'échappe parfois des bouts de tuyaux indiquant l'évacuation artificielle d'eau de pluie sous la route, mais toujours dans le désert. Nous rejoignons ainsi le salar de Chiguana, plat mais pas encore tout à fait blanc, pour une longue traversée de cette étendue apparement sans fin. Nous dépassons une ancienne mine de soufre11 à l'entrée puis soudain, sur le flanc d'une colline que nous longeons, apparaît un petit cimetière, petit bosquet de croix noires sur fond blanc. De l'autre côté de la colinne, une ville fantôme fait son apparition, maisons et école en ruines. Au bout de ce village, une poignée de militaire s'active, creusant devant des sortes d'énormes champignons noirs leur servant apparement d'habitat. Nous franchissons alors une voie de chemin de fer semblant venir en ligne droite de l'infini (also known as horizon). À gauche, des poteaux électriques sans fils forment une ligne électriques fantaisiste à travers le désert.
Nous quittons le salar pour rejoindre le désert poussièreux et sa végétation (herbes et cactus), la pluie est visible au loin sur les montagnes, nous croisons quelques champs à la sortie d'un village dont la vie m'est inimaginable et nous atteignons enfin l'hostal où nous allons passer la nuit: l'Hostal de Sal qui porte bien son nom puisqu'absolument tout est en sel: du sol en poudre de sel aux murs et mobilier en briques de sel! Un peu groggi par le voyage je prend un quart d'heure à l'écart des autres pour prendre mes notes (non, je n'écris pas tous mes posts de mémoire) en écoutant en boucle Wankelmunt - One Day12. Je repense au trajet et à l'expérience du voyage en 4x4. Si nous roulons parfois dans le sillage les uns des autres, ils arrivent aussi que les trois voitures de notre expédition roulent de front, séparées de quelques dizaines de mètres. Dans ces moments, la vision d'une voiture fonçant dans le désert, soulevant derrière elle un nuage de poussière, m'évoque des images du Paris - Dakar à la télé dans un chalet et à la lumière d'un feu de bois. Souvenir fabriqué? Toujours est-il que tout ceci me donne une envie folle d'apprendre la moto et le 4x4 pour traverser le désert par moi-même la prochaine fois. Ce doit être un véritable plaisir.
Le repas est bon et convivial (peut-être que la douche chaude n'est pas étrangère à la meilleure ambiance!), nous faisons tous plus ample connaissance, ça parle dans plein de langues: espagnol, anglais, allemand, français... J'adore ces rencontres collectives sur la route où tout le monde parle deux ou trois langues (sauf, souvent, les anglophones, mais heureusement pas tous) et où il faut changer sans cesse d'idiome, donnant parfois lieux à de bons fous rires lorsque l'on se trompe de langue pour notre interlocuteur.

Jour 3: La nuit aura été meilleure et moins froide que la précédente et pendant que tous se préparent, je remarque devant l'hôtel des cactus dépouillés de leur enveloppe épineuse. Apparaît ainsi le bois que je mentionnais dans le post précédent, et l'on peut alors remarquer qu'il constitue une enveloppe interne creuse du cactus, ce qui change considérablement de ce que nous avons l'habitude d'appeler "bois"!
Une fois les sacs arnachés sur les toits des 4x4, nous entrons dans le salar de Uyuni, le plus grand au monde (12000km2). C'est une immense étendue blanche (immaculée) et lisse (grâce aux pluies) qui s'étend à perte de vue, effacant tout repère et condamnant les inexpérimentés à errer ou à s'embourber dans les zones dangereuses. Pour s'orienter, nos guides-chauffeurs se fient aux montagnes à l'horizon qu'ils savent reconnaître et qui leurs indiquent des directions précises à l'aide de grands panneaux lumineux, un peu comme les types dans les aéroports. Après plusieurs minutes de routes dans un blanc parfait, apparaît à l'horizon l'île Incahuisa ("maison des Incas" en quechuan13) que nous allons visiter. Couverte des cactus déjà mentionnés plusieurs fois (et qui grandissent d'1cm par an, ce qui permet de se rendre compte de leur âge multi-séculaires, certains faisant plus de 10m). Le ciel est d'un bleu pur répondant au blanc immaculé du salar. Du coup, l'île rocheuse et terreuse mérite bien d'être nommée "île" puisque depuis ses hauteurs, on croirait à des lagunes et des péninsules. Je m'asseoit quelques minutes à l'écart, le regard perdu dans le décor, ne pensant à rien. C'est agréable.
Nous poursuivons la traversée en faisant une longue pause pour prendre les fameuses photos que tout le mode fait: le paysage étant exclusivbement blanc et désert, la perspective est trompée et on peut créer des illusions d'optique rigolottes mais rarement inédites. Nous atteignons enfin la limite du salar pour le déjeuner vite expédié. (Anecdote: le panneau "No Votar Basura" au lieu de "No Botar Basura". Cette dernière phrase signifiant "Ne pas jeter de déchets", et "Votar" voulant bien dire ce que l'on croit, je vous laisse comprendre en quoi c'est drôle.)
Nous filons en direction d'Uyuni, le terminus de l'expédition pour 17 membres de celle-ci. Chemin faisant, nous croisons des exploitations de sel (il faut casser le sol et récupérer des couches d'une dizaine de centimètres avant de l'acheminer vers un lieu où le sel sera traité pour enfin arriver sur nos tables). Avant de descendre, nous faisons une dernière pause au cimetière de trains où reposent des locomotives servant auparavant à acheminer du minerai vers le Chili. On y voit deux trains étrangement peu abimés pour des trains censés être entrés en collision. On y voit aussi d'énorme tags d'équation physique. L'un étant la formule de la force gravitationelle, l'autre étant attribuée à Albert Einstein, est la formule de la relativité générale.
Finalement, le voyage prend fin dans un joyeux bazar à l'agence et après avoir pris une douche à l'hôtel des filles, je m'apprête au retour, seul avec le chauffeur dans un 4x4, quittant un peu à regret le groupe dans lequel une bonne ambiance régnait et la ville d'Uyuni où se prépare une fête pour le soir même. Sur le trajet du retour, nous ramassons l'un après l'autre deux auto-stoppeurs (dont l'un paye son voyage) et retournons dans le désert, au début en suivant une ligne à haute tension ce qui est un spectacle particulier. Nous roulons plus tard que de coutume, le but étant moins de visiter que de retourner à San Pedro. Ceci donne lieu à une pause-pipi au milieu du désert, juste après la traversée d'un petit río, sous les étoiles, pendant que le chauffeur resert les roues de son véhicule à la lumière de son portable. Regarder la route défiler à la seule lumière des phares a quelque chose d'hypnotisant. La pause nocturne se fait dans un refuge similaire à celui du premier jour. Je partage mon repas avec d'autres français sur la même route que moi et vais me coucher, seul dans mon dortoir, au milieu de rien, pendant que le guide démonte son 4x4.

Jour 4: Le départ matinal se passe bien et c'est un joli spectacle que de voir le soleil se lever sur le désert. Au bout d'un moment, la musique commence à devenir écoutable grâce à Radiohead - Creep et au By the Way des Red Hot Chili Peppers, de l'époque où c'était encore écoutable, mais il manque la seule véritable chanson appropriée au décor rocheux que nous traversons à toute vitesse: Life on Mars, de David Bowie.
Les plusieurs heures du voyage sont l'occasion de laisser mon esprit dériver, et lorsque retentit Zombie des Cramberries, je me retrouve le corps dans les montagnes boliviennes, la tête en Irlande du Nord, les mots de Sorj Chalandon devant les yeux... Après avoir contourné la laguna colorada par l'est (à l'aller nous étions passé par l'ouest), je retrouve pour une courte pause le refuge du premier jour dans lequel une autre équipe est en train de prendre son petit déjeuner. C'est à ce moment là que je réalise à quel point ce qui est pour chacun de nous une aventure singulière est en fait un quotidien et qu'il n'y pas de raison de croire avoir vécu plus que ce que c'est en réalité: un joli tour bien organisé qui vaut franchement le coup mais pas l'aventure d'une vie. Ce qui fait joliement écho à la chanson de Radiohead.
La fin du retour se passe très bien, dans le désert saupoudré de la neige tombée derrière nous. De retour au post frontière, je prend le petit-déjeuner avec l'expédition partante (plus réduite que la notre) sous quelques flocons avant de rejoindre un San Pedro chaud et ensoleillé.

PS: J'ai remarqué pendant ce voyage une double résistance. D'abord le soleil qui me marque moins que d'autres et fait ressortir mon cuir espagnol (plusieurs fois on m'a pris pour un chilien. Avant que je ne parle, évidemment.), ensuite ma plus grande résistance au froid, sûrement dû à mon sang ch'ti.
Bien sûr, toute personne ayant la moindre notion de biologie est priée de se taire et de me laisser raconter mes inepties. Non mais.

1: MOI
2: Entre les deux, la vallée est à 4800m et fut un lieu sacré pour les Incas qui venait y célébrer des cérémonies (pas froid les mecs3).
3: Rien de sexiste, je doute juste que le clergé féminin inca eut-été très puissant...4
4: Je me trompe peut-être, mais Wikipedia n'a pas l'air de dire le contraire. Et pour les ronchons qui ne lisent pas l'espagnol (vraiment, je comprend pas...)5
5: Non, en fait, rien. C'était juste pour le plaisir de continuer.
6: En vrai, je ne me souviens plus des roches à cet endroit, mais j'ai noté qu'il y en avait et ça fait bien dans la phrase, alors zut.
7: Et ça je m'en souviens.
8: Au passage, le clavier de cet ordinateur est rigolo: les lettres imprimées s'étant pour la plupart effacées, elles ont été remplacées par des lettres découpées et scotchées de couleurs diverses et variées, ce qui donne l'impression d'un clavier d'anniversaire. Cette remarque était, une fois n'est pas semble devenir contume, tout à fait inutile.
9: petite astuce pour arrêter de dire l'arrêt, et j'espère que personne n'aura besoin de google trad, de reverso ou d'un dictionnaire pour les old school pour traduire "parada" après cette explication.
10: Il s'agit d'un losange blanc où la silhouette noire d'un flamant en vol est représentée, barrée d'un épais trait rouge.
11: Les mines de soufre de la région (on en trouvait aussi en Atacama) servaient à produire de l'acide sulfurique nécessaire à l'extraction du cuivre dans la mine de Chuquicamata, aujourd'hui seconde plus grande mine à ciel ouvert et responsable de la production de 1300000t de cuivre par an.
12: Dédicasse à toi, qui te reconnaîtra, si tu passes par ici...
13: Oui, parce que j'ai oublié de préciser, mais nos guides sont quechuan, se parlent en quechuan et la région est fortement peuplée en descendants de la civilisation Quechua. Le premier qui s'imagine une civilisation fondée sur des tentes repliables se prend une baffe.

mercredi 11 juillet 2012

San Pedro de Atacama, première

Aux dernières nouvelles, j'attendais le bus pour San Pedro de Atacama à Arrica. Et ben j'ai pris ce bus, et tout s'est (à peu près) bien passé. Sauf peut-être que la route en mauvaise état et le contrôle de douanes (sans passage de frontière!) ont garanti une mauvaise nuit. Après une correspondance d'une heure et demi dans la froid de Calama (à 6h du matin), j'arrive enfin à San Pedro de Atacama, point de ralliement de tous les touristes pour visiter le coin (magnifique). Je rejoins L. et B. dans leur hostal, "loin des gringos" (s.i.c.), pose mes affaires et nous retournons en centre ville pour réserver l'excursion du dimanche et louer des vélos, direction la Valle de la Luna.

Il s'agit, je pense, de mon premier vrai contacte avec le désert: rouler sur une piste vaguement gondronnée, entouré de sable et de montagnes (au loin), sans croiser personne. Lors d'une pause nous constatons, impressionés, le silence total qui nous entoure.
Après avoir atteint l'entrée de la vallée et parcouru encore quelques kilomètres sur la piste poussièreuse, nous faisons la première pause: "visite" d'un canyon.
Sur l'indication d'un couple de français nous précédant, nous nous engageons dans un canyon étroit (ce qui semble être le chemin balisé et facile étant fermé) aux paroies plus ou moins couvertes de sel. Les formations rocheuses sont impressionantes et paraissent parfois translucides. Nous atteignons une cavité obscure mais, ne voyant plus ma main au bout de mon bras après trois mètres, nous décidons de faire demi-tour. C'est alors que nous rencontrons K. et M., un couple de français vivant au Pérou1 et équipés de lampes torches (petites, mais suffisantes). Nous nous retournons donc dans le canyon , traversons en cinq minutes et quelques génuflexions le couloir sombre et débouchons en plein air, d'abord sur la suite du canyon, tout aussi belle, puis après une brève escalade sur le haut des formations rocheuses qui offrent un paysage . On peut aussi penser à Tatooine et s'attendre à tout instant à voir surgir des Tuskens de derrière les rochers. Il n'y a en tout cas rien, sinon une petite flèche en bois indiquant le chemin, qui rappelle l'être humain, et c'est plutôt cool.
On quitte ce lieux magique pour récupérer les vélos et poursuivre la route. Je me tue à monter une côte plus longue que prévue que les filles préfèrent monter à pied et nous posons pied à terre pour la seconde fois: les dunes immaculées qu'aucun pied n'a jamais foulé (normal, puisqu'elles sont immaculées) nous attendent. Après avoir atteint le mirador à couper le souffle par un petit chemin à flanc de colline, nous décidons de ne pas faire les touristes en se contentant de cela et continuons sur la crête vers un aplomb rocheux surplombant deux vallées, une de chaque côté, et surplombant le salar que nous "visiterons" le lendemain.
Comme il est déjà tard, nous ne poussons pas plus loin. Pique-nique à l'ombre et retour à proximité du village. Sur la route du retour, le solei plus bas qu'à l'aller fait ressortir les couleurs qui nous avaient échappées sur le flancs des montagnes de l'autre côté de la plaine: de l'ocre, du vert et du violet qui viennent s'ajouter au jaune du sable, au blanc des cimes enneigées et au noir des cendres (tout est volcan ici).
Nous avons la flemme de pousser jusqu'à la Valle de la Muerte et nous contentons de regarder le soleil se coucher derrière les roches rouges2 et ciselées de son entrée en grignotant, buvant du mate et discutant tranquillement, le tout au pied d'une croix hommage à Jean-Paul II au sommet d'une petite colline.
Retour au village, achat de lunettes de soleil pourries juste pour ne pas perdre mes rétines dans d'atroces souffrances, réservation de l'expédition du lendemain, visite de l'église (qui a un toit joli), poulet-pâtes à l'auberge et dodo, la peau qui tire un peu, cuite par le soleil du désert le plus sec du monde.

Le lendemain matin, départ à 8h, dans la "fraîcheur matinale"3 pour l'excursion des Lagunas Altiplanicas, autrement dit les lacs situés à plus de 3500m d'altitude, mais pas que.
On commence par une pause dans le village de Toconao, autrefois aussi important que San Pedro puisqu'ils partageaient tout deux de bonnes ressources en eau. On y trouve un clocher datant de 1750 dont la porte et la charpente sont en bois de cactus (de même que le toit de l'église de San Pedro visitée la veille au soir. Le guide, en plus de faire complètement fondre L., sait plein de choses et nous apprend que les triangles que l'on voit partout à San Pedro sont le symbole de la ville et représentent les montagnes qui fournissent son eau à la ville. De la même facon, les gravures d'âne et de lama à l'entrée de l'église de Toconao rappelle le caractère quasi sacré de ces anumaux pour la ville, l'âne servant à l'agriculture et au transport tandis que le lama fourni généreusement et de son plein gré de la viande et de la laine. Nous apprenons également que dans les églises locales (et cela s'applique également à l'église brièvement visitée pendant l'excursion au lac Chungara), le Christ4 n'est pas derrière l'autel mais d'un côté ou de l'autre du transept. Dans l'abside on trouve par contre un ensemble de statuettes des saints locaux ou régionaux. La particularité de cette petite église perdue est que l'on trouve également une des (apparement) trois seules représentations de Dieu5: avec les saints locaux figurent des statuettes représentant Jésus, son papa et une colombe pour l'Esprit Sain. Les autres représentations de mon collègue barbus sont en Hollande et en Italie. Un fait étrange pour le petit francais que je suis dont l'éducation repose en partie sur une certaine loi de 1905 et une épuration écclésiastique d'un certain mois de mai 1871: la présence du drapeqau chilien à côté de l'autel, en vis-à-vis avec celui du Vatican. Avant de repartir, L. résume très bien la visite du village: "J'ai vu Dieu et des lamas, je suis contente." Tout est dit.
On reprend la route en mini-bus et je me dis que parcourir le désert d'Atacama, voire même le Chili en général à moto doit être absolument génial. Sentiment qui sera confirmé par l'expédition du salar d'Uyuni.
Le deuxième arrêt a lieu dans le salar d'Atacama. pour ceux qui n'ont pas encore ou compris, ou utilisé Google, un salar c'est un lac salin, mais je trouve plus joli d'utiliser le mot espagnol. Celui d'Atacama dans lequel nous sommes est le cinquième plus grand au monde (le premier étant celui d'Uyuni). C'est moins blanc et plats que je me serais imaginé, mais cela s'explique par l'absence de pluie qui fait que le lieu est dans le même état depuis son assèchement (naturel6), c'est à dire que les minéraux sont mélangés et forment parfois de petits monticules. C'est par contre le salar le plus profond: on peut encore trouver du sel à 150m de profondeur. On y voit quelques flamants roses qui ont la vie dure (par manque de nourriture, ils sont obligés de passer énormément de temps la tête dans les 20cm d'eau de la lagune de Chaxa au milieu du salar, ce qui entraîne la perte de leurs plumes sur le sommet du crâne, exposant ainsi leur peau au soleil qui s'amuse bien à y implanter son meilleur ami le cancer, réduisant l'espérance de vie de ces grands pigeons roses de 12ans en conditions normales de pression et de température à 8 ou 9 ans. On voit aussi d'autres oiseaux dont une mouette qui s'amuse se nourrit en mangeant les oeufs des autres.
La montée jusqu'aux lacs nous fait traverser une plaine en pente ascendante, rocailleuse puis rocheuse avant de laisser place à un tapis de végétation jaune en touffes qui recouvre le sol jusqu'aux lacs à 4300m. L'altitude me fait moins d'effet qu'à Chungara, mais c'est parce qu'on est partis de moins haut (San Pedro est à 2300m). On voit des vicuña (un lama couleur Bambi), des oiseaux; les paysages sont trop beau, c'est la fête. Sur le chemin du retour, le repas est trop bon et on rentre tout content se préparer à l'expédition de trois jours en direction d'Uyuni, en Bolivie, après avoir dégusté un bon repas local dans un restaurant populaire excentré ressemblant fortement à une cantine!

PS: Le message précédent était écrit depuis un cyber-pas-de-café à San Pedro de Atacama qui a depuis été fermé pour cause de fraude fiscale. Tralalala.
PPS: La devise des carabineros est: "Un amigo siembre" (toujours un ami). Personnellement, quelqu'un qui écrit être mon ami sous le dessin de deux fusils croisés, ca m'inspire moyennement confiance.


1: C'est un couple de web-designers travaillant ensemble à la construction de sites internets, installé depuis un an au Pérou avec pour objectif de vie de passer un mois sur trois en voyage. Ils ont construit un blog à partir de rien pour raconter ça, et du coup je suis un peu jaloux (au-delà du fait que leur vie est trop cool) parce que ça m'aurait bien amusé de faire pareil, mais ça m'aurait pris beaucoup trop de temps et ça n'aurait pas été aussi bien... Mais d'un autre côté, j'ai pu faire (au grand dam de L. et B.) des blagues d'informatique, ce qui est assez rare dans une conversation normale entre gens civilisés.
2: La Valle de la Muerte tient son nom d'une déformation de son nom originale, Valle de Marte, en référence au truc rouge qui a l'indécence de se balader dans le ciel en étant suffisant près pour être atteint mais trop loin pour que ce soit facile.
3: Je crois que les filles diraient plutôt qu'on se les geleaient grave, mais je ne veux pas trop m'avancer.
4: La version clouée.
5: La version catholique.
6: Le salar s'est formé suite à l'assèchement d'une partie de l'océan piégé par la formation des cordillières avoisinantes.

samedi 7 juillet 2012

Première excursion: vers le lac Chungara

Voici le récit de ma première excursion pendant cette vadrouille chilienne (et bientôt bolivienne). J'entend par excursion le parcours en mini-bus ou 4x4 organisé par des agences, qui peuvent paraître chères, mais permettent de voir un certain nombre de choses en peu de temps, et c'est de toute facon la seule facon d'accéder à certains sites lorsaue l'on est à pied, comme c'est mon cas.

Note: Je n'ai pas sous la main le nom de la plupart des lieux que je vais décrire, j'éditerai donc probablement ce post en les rajoutant, si les noms vous intéressent, n'hésitez pas à reparcourir ce message.
EDIT: C'est fait.

L'excursion commence sur le coup des 8h du matin, nous sommes une quinzaine de touristes dans un mini-bus (plein) avec un chauffeur (logique) et un guide. Seuleument deux étrangers: moi et une hollandaise en vadrouille dans la région (elle a visité la Bolivie, Atacama et s'apprête à remonter sur le Pérou); tous les autres sont des chiliens venus découvrir leur pays (c'est un minimum, il faudrait peut-être que je finisse par envisager de le faire en France, tiens...).
Une fois tout le monde ramassé, direction le nord sur la Panaméricaine qui file vers le Pérou. Après quelques kilomètres sur cette route qui n'a pas particulièrement d'intérêt (je sais pas pourquoi j'y consacre trois lignes), on bifurque sur la route qui mène à l'est, donc à la cordillière et derrière, à la Bolivie. Le premier arrêt se fait au bord de la route pour admirer (de loin, mais pas le choix) les dessins géants réalisés à flanc de colline par les populations indigènes et ancestrales du coin: les Geoglifos del valle Lluta. Ces dessins sont réalisés en posant des roches volcaniques les unes à côté des autres. On reconnait facilement un lama géant, et avec beaucoup d'imagination, une famille. Le trajet reprend et par la fenêtre on peut admirer d'autre dessins du même genre sur les dunes de plus en plus ensablées, parcourues par des langues de sable rouge et noir et s'enfoncant dans la couche de nuages bas recouvrant perpétuellement la ville.
On s'arrête brièvement pour regarder une petite église blanche (la iglesia de San Gerónimo) et ocre à l'extérieure, blanche et bleue à l'intérieure, reconstruite maintes fois après sa destruction systématique par les tremblements de terre. Persévérants les chiliens/croyants. Suite à cette petite pause, l'ascencion commence (il s'agit tout de même d'atteindre un lac à 4500m d'altitude en partant d'une ville portuaire!). Je découvre avec surprise l'existence d'une vallée verte au-dessus de laquelle nous nous élevons: en plein désert, sans la moindre végétation sur les flanc des montagnes, la présence d'un río au fond de la vallée assure le développement d'une importante végétation, et même de champs. À peine habitué à cette vallée, j'ai droit à une autre expérience qui sans être renversante, vaut qund même le détour: la traversée de la couche de nuages sus-mentionnée, qui après quelques minutes de brouillard laisse place à un ciel d'un bleu immaculé et à un soleil brillant de milles-feux (aucun superlatif n'est à négliger) que l'on ne soupconne pas de la ville tant la couche de nuage assure la diffusion homogène d'une lumière blanche et un tout petit plus lumineuse que blafarde. J'ai oublié ma casquette, et je n'ai pas de lunettes de soleil. Hmm. Bon, la capuche fera l'affaire, hein...
L'arrêt suivant nous laisse admirer des cactus en forme d'arbe de trois, quatre ou cinq mètres. Le tout dans une petite vallée sans autre végétation et le long d'une nouvelle expérience rigolote: la route semble en descente, mais moteur coupé et en roue libre, la voiture remonte. J'avoue ne pas avoir trouvé d'explication... Nous rejoignons ensuite le mirador Copaquilla à 300m d'altitude (le fond de l'air commence à se faire frais, comme dirait l'autre) qui surplombe un canyon et offre une vue sur un village où vivent 9 familles Ayamaréennes. La présence de poteaux électriques traversant le décor rappelle la main mise de l'Homme et de sa technologie sur la nature et semblent vraiment détonner dans le désert, même si les courageux qui vivent dans le coin ont bien évidemment le droit à l'électricité et au télephone (sinon il ne pourrait pas regarder Game of Thrones ou The Walking Dead, ce qui est franchement dommage).
Nous reprenons la route (voire la sieste), croisons les restes de fortifications (c'est tout petit: soit il n'en reste rien, soit la bataille se faisait à 5 contre 5) et faisons la pause petit-déjeuner dans le village de Zaharuina (alors là, le nom c'est un vague souvenir sans garantie, hein)(EDIT: vérification faite, il s'agit de Zapahuira) qui est à la frontière entre le désert et le parc (c'est le désert mais avec des petits bosquets verts foncé en plus, le genre de truc qui passe en roulant devant Clint Eastwood qund il a décidé de montrer à un type lambda qui la ramène un peu trop qui c'est le meilleur tireur du désert): pain, confiture et mate de coca. La coca n'est pas le diminutif de cocaïne (même s'il y a peut-être un lien, au secours, je suis un drogué) mais une plante qui se mâche pour aider la respiration en altitude. Ici, il s'agit d'une infusion de ces plantes dans de l'eau chaude. Un peu âpre au début et puis ce n'est finalement pas mauvais.
Le mini-bus redémarre et nous roulons dans une odeur de sable et de poussière qui n'a strictement rien de surprenante vu le décor. Je vois, puis touche mes premiers lamas. Ceux-ci sont à poils laineux1, une couche tellement épaisse qu'en les touchant brièvement (ils n'aiment pas trop être touchés, même s'ils n'ont pas peur de se balader parmis les humains touristes) j'ai l'impression qu'il n'y a pas de corps en dessous! On croise encore de la flaure locale comme une perdrix andine ou un rapace (peut-être un condor, mais vues mes compétences remarquables en ornithologie je ne m'avancerai pas trop. Ceci dit, c'était définitivement un rapace. Après il est peut-être végetarien, en tout cas il ne s'en est pas vanté.). Le guide parle aussi de la flore, mais bon, faut trop pas pousser mes compétences en chilien: j'y comprend rien. Au dessus de nous, le volcan, culminant à 6000m nous toise, paternel2.
Enfin, nous atteignons le lac Chungara, clou du spectacle, à une altitude que j'ai déjà mentionnée, il fallait suivre. Il est entouré de montagnes (et/ou volcan selon leur tendance à cracher du feu, faculté qu'ils n'exhibent pas sur leur front, peut-être par peur des discriminations) enneigées et offre un sublime spectacle à mes pauvres yeux de citadin plus habitués à la grisaille des rues qu'aux étendues d'eau à 4,5·103 mètres au-dessus du niveau de la mer (ou en l'occurence de l'océan), altitude ou je m'attend à trouver au minimum trois mètres de neige et un Mont-blanc plutôt que de la végétation et des oiseaux.
Ceci dit, je ne fais pas trop le mariole: encaisser 4500m de dénivelé en quelques heures ne se fait pas sans un petit mal de crâne et les capacités de mouvement, de sprint ou de saut à la perche se voient fortement limitées par le besoin de marcher au ralentit en inspirant profondément.
Le volcan au pied duquel nous sommes semblent attendre d'être escaladé, c'est difficile de se rendre compte aue le sommet est en fait 2000m plus haut. Autre fait remarquable: des gens vivent pas loin. Je me demande sincérement à quoi ressemble leur vie, pourauoi ils ont choisi de venir/rester, quelles sont leurs inspirations etc. Mais bon, je vais rester avec mes langages de programmation et laisser l'anthropologie à d'autres, même si je ne doute pas que ce soit passionant et qu'au moins, ca permette plus de voyager que l'informatique fondamentale qui n'a besoin que d'un bureau et d'un ordinateur.
Sur le chemin du retour, une brève halte dans un village au maisons en pierres blanches et au toit de chaume, qui, en plus de me faire tourner la tête par l'altitude, me surprend: tellement surréaliste de croiser ici le même drapeau qu'au coeur de Santiago! Suite à une longue descente, la pause déjeuner se fait à Putre, village d'altitude intermédiaire (Chili style, hein) et fait du bien. Enfin, retour pour Arica avec une halte imprévue pour partir à la chasse (pour les voir, pas pour les tuer) aux Huemuls, l'un des deux animaux du blason chilien (le second étant le Condor). J'apprendrai par la suite que le huemul vit en fait au sud, au début de la Patagonie et que ceux-ci ont donc dû être introduits.
L'arrivée à Arica se fait juste après la nuit tombée, une mauvaise empanada et une grosse nuit de sommeil m'attendent.


1Sans référence aucune à l'Âge de Glace, bande de drogués à Pixar!
2Ou maternelle, hein, je suis pas sexiste. Ça en impose, quoi.

jeudi 5 juillet 2012

¡Vamos al Norte!

De retour de Pucón et après une journée de repos à Santiago chez le compañero S., je prend l'avion pour la ville chilienne le plus au Nord du pays: Arica, située à une vingtaine de kilomètres du Pérou, à l'extrême nord du désert d'Atacama où je m'apprête à aller.

Malgré la courte nuit, je fais l'effort de rester éveillé dans l'avion qui fait le trajet Santiago - Arica (en 2h30, soit le temps pour aller à Stockholm approximativement), au moins le temps d'apprécier le survol de la Cordillière dont les sommets enneigés transpersent une mer calme et continue de nuages. À l'autre bout du vol, la traversée de cette couche de nuage laisse directement place à la ville, au désert et à la Cordillière, un spectacle qui vaut largement de s'épargner les 35h de bus nécessaires pour rallier la ville depuis la capitale. Mon premier contacte avec le désert chilien (j'ai déjà traversé un petit désert en Espagne) a lieu pendant le trajet en minibus vers le centre-ville: un longue plaine roccailleuse et poussièreuse derrière laquelle se dresse la pré-Cordillière (les sommets entre 1000 et 3500m).
La ville elle-même est assez étendue, et à part son centre où se dressent quelques immeubles, une église construite par Eiffel et un bâtiment très époque conquistadores, le reste est composé de maisons basses, cubiques, peintes en couleurs vives ternies par la poussière. Un Christ surplombe la ville depuis la colline la délimitant au sud, et on trouve un peu partout (sur des affiches, sur les rideaux de fer ou même en enseigne - Centro de ayuda espiritual) des messages de prosélytisme.

Une fois installé dans la petite chambre de mon auberge (le lit occupe presque toute la place et à part dela il n'y a qu'une vieille TV que je n'ai pas essayé de brancher), je cherche à réserver une expédition dans le parc naturel proche (à l'échellle du Chili). Je finirai par y arriver en fin de journée après m'être fait conseiller par un belge très sympa. Je visite le musée in situ de momies (trop fragiles pour être déplacées, un musée a été construit sur le lieux de leur découverte), je me balade en ville et je pousse jusqu'au spot de surf plus au nord pour regarder le soleil se coucher dans l'océan. Ce ne sont pas les rouleaux des films ou des spots des magasins de surf ou skate, mais ce sont quand même des vagues plus impressionantes qu'à Moliets, et les panneaux "zone inadaptée à la baignade" ou "zone à risque de tsunami" finissent de me convaincre!
En rentrant, je constate qu'à 18h, tous les restaurants sont fermés et je me rabat sur une sandwicherie oú je me prépare à me faire arnaquer, avant d'être agréablement surpris par la hamburgesa servie. J'en profite pour signaler que les chiliens raffolent de l'avocat, qui s'appelle ici palta et qui se mange principalement écrasé en accompagnement, sur du pain (y compris au petit-déj') ou dans les sandwichs.
Le lendemain, en revenant de l'expédition qui sera racontée dans le prochain post, j'ai droit à mon arnaque en achetant une empanada toute petite une fortune, et en apprenant (à mes dépends) que jaiba signifie crabe. Mais bon, l'apprentissage par l'erreur est formateur.
Aujourd'hui, après une grasse matinée bien méritée (enfin, levé 10h c'est pas fou non plus, hein) et passée à terminer un recueil de nouvelles de Bukowski, je file vers le musée archéologique de la ville, dans la vallée d'Azapa à l'est. Moins grand que je ne l'aurais cru, j'ai malgré tout du mal à me concentrer sur les panneaux, à croire que voir des morceaux d'os taillés ou de tissus m'intéresse moins que les délires psycopathes des artistes contemporains. Ceci dit, la civilisation antique ici présentée, les Chinchorro, pratiquait la momification et ils ont utilisé durant leur existence quatre techniques différentes que je vais vous présenter (par ordre chronologique), en cas d'apocalypse nucléaire, cela peut servir pour refonder des civilisations primitives.
Momias negras: la technique la plus complexe et celle qui réclame le plus de connaissances. Il faut commencer par complètement désarticuler le corps, extraire les organes et les muscles puis reformer le squelette en le renforçant avec du bois ou des nattes. Ensuite, remplir les cavités et le crâne avec de l'argile, des végétaux et des cendres (on est à proximité d'un volcan!). Pour finir on remodèle le corps en argile grise, on remet la peau, on pose une perruque de cheveux courts et on rajoute les attributs du visage et du sexe à l'aide d'une peinture rougeâtre.
Momias Rojas: tout commence par des incisions dans l'abdomen (et d'autres parties du corps dont j'ai la flemme de chercher la traduction) pour retirer les organes et une partie de muscles. On détache la tête pour extraire le cerveau, on assèche les cavités avec des braises et on renforce la colonne vertebrale avec du bois. On comble les trous et le crâne avec divers matériaux. Il ne reste plus qu'à modeler le visage, mettre une perruque et peindre le corps en rouge.
Momias con vendajes: une variation de la précédente, à ceci près que l'on remet la peau sous forme de bandages (parfois on utilise de la peau de pélican)
Momias con pátina o capa de barro: technique la plus récente, se pratique à priori sans toucher à l'intérieur ni renforcer le squelette, elle consiste à désécher le corps puis à le recouvrir d'un mélange de boue et d'aglutinant protéiné.
La parenthèse morbide se referme ainsi. Je retourne en ville voir le nouveau SpiderMan au cinéma, en espagnol (El Hombre Araña), sinon c'est pas drôle. Je me marre tout seul en attendant le début du film devant le surréalisme de la situation: je suis au bout du monde et je vais voir SpiderMan le jour de sa sortie dans une langue où je risque de rater 50% des rares dialogues et en plus je me trimballe un paquet de pop-corn pour pas faire les choses à moitié. En tout cas le film est divertissant, le personnage plus proche du comics que celui des films de Sam Raimi (Peter Parker est un vrai lycéen, nerd mais pas caricatural, il skate - il y a des équations écrites sous ses skates! j'approuve! - et arrive à peu près à avoir une vie sociale; il doit fabriquer ses propres lance-toiles) mais les traversées de New-York me paraissent toujours aussi peu crédibles du point de vue de la physique! Ce qui est dròle avec le fait de ne pas comprendre les longs dialogues, c'est de réaliser que l'on comprend quand même le gros de l'histoire (certes, je la connaissais déjà) et que ça révèle bien la vacuité du truc!
Dernière remarque de gringo dressé à la culture US: il y a une base militaire pas loin d'Arica, du coup plein de militaires en uniforme en ville. Comme c'est le désert, l'uniforme est couleur sable et comme nos copains étatsuniens ont eu le bon goût de démarrer deux guerres de dix ans au Moyen-Orient, j'ai tendance à me représenter les soldats US en uniforme sable, d'où une seconde de doute à chaque soldat croisé ici: mais que font les USA à Arica? Et puis je me souvient que quand ils veulent intervenir ici, ils n'ont pas besoin de se déplacer, il leur suffit de financer les militaires locaux qui ont su prouver leur zèle par le passé...

lundi 2 juillet 2012

Tour de chauffe: Pucón

Première partie de l'excursion chilienne de votre serviteur: Pucón, ville à quelques 780km au sud de Santiago, à l'intérieur des terres (autant que faire se peut au Chili), au cœur de la région des Lacs dans une zone volcanique.
Mais avant de pouvoir parler de la ville, il faut parler du voyage!

Pour ne pas changer les bonnes habitudes, le départ se fait sur les chapeaux de roues: choisir une gare au hasard, y aller presque à la dernière minute pour acheter le billet, devoir changer de compagnie puis de gare et finalement attendre une heure le bus en retard. Mais finalement, tout va bien et c'est à 10h du matin que j'arrive à Pucón, village aux airs de village alpin et au ciel couvert.

Jour 1: Installation dans une auberge de jeunesse cosy et écolo, avec un très bon restau végétarien. Malgré l'étiquette "écolo", il y a de l'eau chaude dans les douches, mais il est recommandé de se doucher rapidement ou "con un amigo". Bon esprit.
Je rencontre M., jeune français qui fait le tour d'Amérique Latine après avoir vadrouillé entre travail et voyage en Australie pendant un an. Après avoir demandé conseil (en deux fois) à l'agence de tourisme (excursion, location etc.) tenue par des français forts sympathiques, on se sépare pour l'après-midi: on va au même endroit, mais lui décide d'y aller en bus tandis que je me laisse tenter par l'effort et choisi le vélo pour une balade de 44km (44 KM !!) dans l'après-midi. Cette balade me conduit dans un premier temps à Los Ojos de Carbuga, petites cascades dans la montagne. Si le lieux est superbe et reposant, le chemin vaut également le coup. J'ai roulé sur un chemin à flanc de montagne surplombant une rivière, seul. Magnifique. En chemin, j'ai croisé des moutons (semblables aux moutons irlandais) qui connaissent la priorité à droite: alors que le troupeau était en train de traverser la route, ils se sont arrêté lorsque je sui arrivé à une vingtaine de mètres d'eux pour me laisser la voie libre et ne reprendre la traversée quelques temps après mon passage.
Après une heure à souffler et contempler les cascades, je décide de reprendre la route pour rentrer avant la nuit. plutôt que de faire demi-tour (et remonter la longue descente de l'aller), je cherche à faire une boucle en rejoignant la route quelques kilomètres plus haut. Après deux kilomètres, au moment de choisir entre rejoindre la route ou poursuivre jusqu'au lac de Carbuga, destination initialement proposée par les français sus-mentionnés, je me motive ("après tout, ce n'est plus qu'à trois kilomètres et je viens d'en faire deux en peu de temps!"). Et je regrette. J'hésite trois fois à faire demi-tour1 mais poursuis, me répétant inlassablement les deux Vérités du Guerrier2. Je reste à peine quelques minutes devant le lac: la nuit tombe, et il me reste les 22km du retour et je n'ai pas de lampe. En suivant la route, tout se passe bien et je rentre, fatigué mais content de l'effort et de la balade.

Jour 2: Levé 8h30 avec pour projet d'aller faire un trekk au parc national Huerquehue, mais la pluie nous dissuade et de toute façon le bus pour y aller était à 8h30! Du coup, après avoir été invité à sortir avec le personnel de l'agence Aguaventura (celle tenue par toute une tribu de français) le soir-même, on se rabat sur les thermes. Évidemment, pour pas faire les choses simplement, on décide d'aller aux plus éloignée, et au lieu de payer l'excursion proposé, on fait le trajet par nos propres moyens, ce qui signifie prendre deux bus et dénicher un taxi qui n'essaye pas de nous arnaquer. Finalement on en aura eu pour 10000$ (pesos chiliens, je rappelle à ceux qui n'ont pas suivi) de moins que si on avait payé l'expédition. Les thermes elles-mêmes, Termas Geometricas, sont situées dans une étroite vallée dans les montagnes, à 17km le long d'un chemin accidenté du village le plus proche. Ce ne sont certes pas des bassins naturels, mais le design est particulièrement soigné: un pont de bois peint en rouge vif s'enfonce sr 450 mètres dans la vallée, remontant les 17 bassins d'eau chaudes entre deux parois à pic recouvertes de végétation luxuriante. Plus tard dans l'après-midi, la vapeur d'eau dissimulera le pont au-delà de quelques mètres, donnant à la déambulation un air d'expédition digne d'Indiana Jones. Se baigner dans les bassins d'eau allant de 36°C à 42°C dans ce cadre, disons féérique pour varier le vocabulaire, est agréable, même si on finit par se lasser de ne rien faire d'autre que barboter pendant deux heures. La seule activité dynamique consistant à se placer sous la cascade à 5°C pour apprécier le choc thermique en se jetant dans le bassin chaud d'à côté.
Une fois rentré, il faut résister à l'envie de s'assoupir, complètement relaxés par les thermes: nous devons rejoindre le groupe de français logeant au-dessus de l'agence pour un apéro et une sortie en bar. Le tout se faisant à l'heure chilienne, le rendez-vous est à 23h. Mon compagnon de chambré et de thermes renonce pour cause de fatigue et de départ dans le sud le lendemain matin. Pour ma part, je décide de me motiver à me sociabiliser un peu et m'apprête à rejoindre une immense soirée où l'alcool coule à flot. Après avoir jeté des cailloux sur le toit pour que l'on vienne m'ouvrir, il s'avère que ce que j'avais prit au départ pour une immense colloque d'une bande de potes français gérant collectivement une agence de montagne s'avère être la colloque des six (pour l'instant cinq) stagiaires français embauchés pour six mois et sur lesquels reposent une partie de l'administration de l'agence dirigée par deux amis de longue date passionnés de montagne. Et qui plus est, l'ambiance est plutôt calme: seuls les cinq habitants du lieu sont là, sirotant leur verre de vin et jouant au Uno. L'énorme surprise c'est de trouver parmi ces cinq stagiaires D., seul garçon de la colloque et accessoirement compagnon de route de mes deux ans de taule lyonnaise, dont je n'avais pas de nouvelles depuis un an! Une très bonne surprise qui détend d'entrée de jeu l'atmosphère et fait oublier le faux bond de M. et le coquard que je n'ai visiblement pas rendu (mais je vais bien et mon œil n'a rien).
La soirée se passe bien, l'ambiance est détendue, et même si la musique du bar dansant que nous avons ralliés à 2h du matin ne parvient pas particulièrement à me motiver à danser (d'autant que "danser" ne veut pas dire grand chose dans mon cas).

Jour 3: Après une grasse matinée amplement méritée, l'objectif du jour et la cascade de 87m Salto el Claro. Malheureusement, les indications qu'on m'avait données la veille étaient un peu confuse et D. et moi avons passé 4h à parcourir la plupart des chemins rencontrés, évitant systématiquement le bon (et lorsque nous avons trouvé - sans le savoir - le bon chemin, la victoire nous a semblé trop facile et nous avons donc choisi d'emprunter une mauvaise route après seulement une dizaine de mètres). Ainsi nous n'avons pas trouvé la fameuse cascade, mais la balade vallait largement la peine, même sous la pluie. La végétation, exception faite de la forêt et des montagnes entourant les collines que nous parcourions rappelaient cette chère Irlande et la vision des pics abruptes couverts de forêts, la cime dans la brume et les nuages avait quelque chose de .
Le soir, je rejoins de nouveau le groupe de français pour un asado, nom donné ici au barbecue, repas bien plus traditionnel qu'en France puisqu'il s'en fait même en hiver et que tous les bons immeubles de Santiago ont sur leur toit de quoi en faire (même au trentième étage, à côté d'une piscine!). L'asado de ce soir consiste en un énorme morceau de viande non identifié (peut-être de l'agneau) cuit à la broche puis découpé en morceaux de taille moyenne pour être mangés à main nue, accompagné de purée et de légumes cuits sur le feu périssant du barbecue. Le cadre, un Hostal tout en bois était participant à la bonne ambiance et donnait envie de s'y installer pour couler des jours heureux.

Jour 4: Je n'ai pas suivi le smala en boîte la veille (déjà parce que je devais prendre un bus à 8h30, et puis parce que la musique ne semblait pas prometteuse) et je réussis donc à me lever à temps pour plier bagage, poser mon gros sac dans la custodia et prendre le bus pour Huerquehue. Malheureusement le temps est encore moins clément qu'annoncé et lorsqu'on arrive en haut (nous sommes trois dans le bus: un américain et un allemand avaient le même projet que moi), le garde de l'entrée du parc nous interdit d'aller jusqu'aux lacs (censé être le clou du spectacle). Par contre on a pu aller jusqu'à de magnifiques cascades moyennant deux heures dans la boue et les premières neiges. Une nouvelle fois, les décors "envoient du rêve". Du coup je vais essayer de retourner à Pucón sur un week-end en août pour aller voir les lacs en raquettes et peut-être tenter une expédition organisée par Aguaventura jusqu'au sommet du volcan voisin. Depuis le temps que j'ai envie de gravir un sommet, ce serait bête de rater l'occasion quand elle se présente et que la difficulté n'est pas excessive...

Et sinon, anecdotes: étant rentrés dans la nuit à Santiago, j'ai pu retrouver avec un plaisir non dissimulé la fameuse rubrique "Mujeres en línea" qui m'a appris aujourd'hui que 80% des motardes préfèrent passer du temps avec à moto plutôt qu'avec leurs enfants et que le thé vert éliminé la graisse. L'équivalent pour les jeunes "jovenes en línea" m'aura appris que 15% des utilisateurs d'iPhone préfèrent se passer de sexe plutôt que de passer un week-end sans leur portable. L'ensemble des lecteurs de ce blog ayant quelques bases de sociologie apprécieront j'en suis sûr l'étendue de ce savoir nouveau que leur apporte TVMetro.


1: au passage je tiens à dire, et ce n'est absolument pas de la jalousie ou de la rage, que l'équitation est l'incarnation de la nature humaine profondément impérialiste: elle préfère domestiquer une espèce entière plutôt que d'inventer la roue, le vélo et utiliser ses jambes!
2: No Pain, No Glory et No Retreat, No Surrender